[FR] La Nef Vagale réunit huit artistes notamment QTBIPOC et psychodivergeants (vivant avec des troubles de l’autisme, bipolaire, adhd, trouble anxieux), ayant une intimité avec les expériences traumatiques et des souffrances psychiques. Ce projet invite à plonger dans un univers chorégraphique mêlant vidéo-danse, psychogéographies, science-fiction, art sonore, fermentations, théorie polyvagale et pratiques somatiques.
Une nef est le cœur sacré d’un bateau, c’est aussi la partie centrale d’une église (dont l’architecture, retournée, à servi à construire des navires). Dans ce projet, la nef réfère à la fois aux vaisseaux personnels que forment nos corps respectifs et un vaisseau que nous formons et co-régulons tous ensemble : un corps collectif.
Les psychogéographies (utilisées notamment en géographie, cinéma et psychologie) évoquent des paysages ou des atmosphères liés à des états émotionnels. Nous transformons ces états intérieurs en paysages somatiques et installations scéniques, utilisant ombres, projections vidéo et éléments bioluminescents pour créer des îlots de trauma vivants et interconnectés.
La Nef Vagale est née d’un croisement d’explorations, portées par des artistes et des thérapeuthes qui ont su traverser et transmuter des expériences de trauma ou de souffrance psychique en les abordant comme des paysages somatiques, sonores, visuels et poétiques.
Nous traversons chacun.e. des géographies complexes, uniques, inconnues, douloureuses, solitaires, mais restons pourtant reliés à un corps collectif, aux formes et aux communications souvent mutées ou invisibles.
Le nerf vague est devenu le fil conducteur du projet. Bien que considéré comme le plus important des nerfs crâniens, la plupart de ses communications viennent en fait des intestins vers le cerveau et connectent tous nos organes. En fonction de nos sentiments de danger ou de sécurité, ce système peut passer d’un mode de défense ou de fuite à un mode de présence favorisant des activités comme la digestion, la créativité et les interactions sociales. Le système vagal agit de manière autonome (sans notre contrôle) mais nous pouvons influencer ses activités à travers des contextes somatiques, sensoriels et interpersonnels. Pour nourrir ce système intimement lié à nos flores intestinales, pour stimuler le projet et ses microbiotes, nous partageons des fermentations (thé, lacto, yogourt, etc.) issus de nos diverses cultures d’origine.
Le projet tisse ainsi des liens entre les sens des mots nerf et nef, vaisseau spatial et vaisseaux sanguins, passage de sas, à vide et passage de seuil, psychogéographies et univers microbiotiques. L’anxiété, la dissociation, la dépression (…) constituent autant de paysages psychosomatiques prenant la forme de planètes, de volcans, de brumes denses et insaisissables.
[EN] The Vagal Nave brings together eight artists including QTBIPOC and psychodivergeants (living with autism, bipolar, adhd, anxiety disorders), with an intimacy with traumatic experiences and psychic suffering. This project invites us to plunge into a choreographic universe combining video-dance, psychogeography, science fiction, sound art, fermentations, polyvagal theory and somatic practices.
A nave is the sacred heart of a ship, as well as the central part of a church (whose upside-down architecture was used to build ships). In this project, the nave refers both to the personal vessels formed by our respective bodies and to a vessel that we all form and co-regulate together: a collective body.
Psychogeographies (used notably in geography, cinema and psychology) evoke landscapes or atmospheres linked to emotional states. We transform these inner states into somatic landscapes and scenic installations, using shadows, video projections and bioluminescent elements to create islands of living, interconnected trauma.
La Nef Vagale was born out of a crossroads of explorations by artists and therapists who have been able to pass through and transmute experiences of trauma or psychological suffering by approaching them as somatic, sonic, visual and poetic landscapes.
We each travel through complex, unique, unknown, painful and lonely geographies, yet remain connected to a collective body, with forms and communications that are often mutated or invisible.
The vagus nerve became the common thread running through the project. Although considered the most important of the cranial nerves, most of its communications actually come from the intestines to the brain, connecting all our organs. Depending on our feelings of danger or safety, this system can switch from a defense or flight mode to a presence mode, supporting activities such as digestion, creativity and social interaction. The vagal system acts autonomously (without our control), but we can influence its activities through somatic, sensory and interpersonal contexts. To nourish this system, which is intimately linked to our intestinal flora, and to stimulate the project and its microbiota, we share fermentations (tea, lacto, yogurt, etc.) from our various cultures of origin.
The project thus weaves together the meanings of the words nerve and nave, spaceship and blood vessels, airlock passage, vacuum and threshold passage, psychogeographies and microbiotic universes. Anxiety, dissociation and depression (…) are psychosomatic landscapes in the form of planets, volcanoes and dense, elusive mists.
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[FR] Les artistes venant de mondes culturels différents (Singapour, Jamaïque, Italie, Lituanie, Roumanie, France, Allemagne, Sri Lanka, Egypte, Brésil), iels intègrent aussi à ce monde de science fiction, des pratiques ancestrales et des rituels retrouvés. En plus de moi-même, les principaux artistes du projet sont:
- Hanna Sybille Muller, chorégraphe et conseillère au mouvement, s’intéresse aux pouvoirs étranges, magiques et ordinaires du langage et du corps.
- Charo Foo Tai Wei, interprète et chorégraphe en butô, danse chinoise et contemporaine, explore dans son dernier projet les complexités d’un univers souterrain dans lequel circulent des ruisseaux d’abus domestique, de violence de genre et de racisme systémique.
- Karine Rathle, danseuse, enseignante somatique et chercheuse en santé de la danse, enseigne la danse inclusive et porte un projet de recherche sur les résidus des agressions sexuelles.
- Mariana Marcassa, performeuse, ritualiste, artiste sonore et thérapeute, auteure d’un projet multidisciplinaire portant sur les psychogéographies et les paysages sonores hérités de l’esclavage (Banzo,Brésil).
- Saša Buccitelli, thérapeute communautaire, poète et danseuse émergente
- Mikki Bradshaw, performeur-euse, artiste sonore, et technicien-ne de scène
- Melvin Mariampillai, danseur émergent, va retrouver le projet à l’été 2025
Mise au monde en temps de pandémie, la Nef Vagale a reçu le soutien du Conseil des Arts de Montréal (SASESH) en 2022 et le soutien du Conseil des Arts du Canada en 2024. Cela a permis au collectif de se plonger dans de premières étape d’exploration depuis 202, dont 4 résidences de recherche.
Soutenu par des mentors logistiques, artistiques et thérapeutiques, le projet vise à terme, la constitution d’une scénographie multidimensionnelle. Les artistes participant-e-s sont invité-e-s à développer une connexion profonde avec les méandres de leurs paysages intérieurs, et ceux des autres membres de l’équipage. Dépeindre ces paysages permet de rejoindre et d’ouvrir un dialogue avec un plus grand nombre d’artistes et spectateurs et de rendre visible les ligaments entre expérience solitaire et corps collectif.
La Nef Vagale associe donc art et soin, avec une démarche inclusive et bienveillante envers les sensibilités et les vécus des membres de son équipage.
[EN] The artists come from different cultural worlds (Canada, Singapore, Jamaica, Italy, Lithuania, Romania, France, Germany, Sri Lanka, Egypt, Brazil), and integrate ancestral practices and rediscovered rituals into this science-fiction world. In addition to myself, the main artists on the project are:
- Hanna Sybille Muller, choreographer and movement consultant, is interested in the strange, magical and ordinary powers of language and the body.
- Charo Foo Tai Wei, performer and choreographer in butô, Chinese and contemporary dance, explores in her latest project the complexities of an underground universe in which streams of domestic abuse, gender violence and systemic racism flow.
- Karine Rathle, dancer, somatic teacher and dance health researcher, teaches inclusive dance and is conducting a research project on the residues of sexual assault.
- Mariana Marcassa, performer, ritualist, sound artist and therapist, author of a multidisciplinary project on psychogeographies and soundscapes inherited from slavery (Banzo, Brazil).
- Saša Buccitelli, commuiity therapist, poet and emerging dancer.
- Mikki Bradshaw, performer, sound artist and stage technician
- Melvin Mariampillai, emerging dancer, will return to the project in summer 2025.
Born in a time of pandemic, La Nef Vagale received support from the Conseil des Arts de Montréal (SASESH) in 2022 and from the Canada Council for the Arts in 2024. This has enabled the collective to plunge into initial stages of exploration since 202, including 4 research residencies.
Supported by logistical, artistic and therapeutic mentors, the project’s ultimate aim is to create a multi-dimensional scenography. Participating artists are invited to develop a deep connection with the intricacies of their inner landscapes, and those of other crew members. Depicting these landscapes enables us to reach out and open up a dialogue with a larger number of artists and spectators, and to make visible the ligaments between solitary experience and the collective body.
La Nef Vagale thus combines art and care, with an inclusive and caring approach to the sensitivities and experiences of its crew members.
Nos corps comme des nefs, des vaisseaux qui traversent l’espace-temps, traversés d’affluants, microbiote constellé aux ramifications vagales.
Naviguer à l’écoute. Voir venir les marées. Reconfigurer nos cartes-mère, au goutte à goutte. Traverser des tempêtes sonores et engouffrantes, des nuages qui résonnent, des planètes évidées. Border l’abîme, sombrer souvent, jusqu’à plus fin. Jusqu’au bout de l’écueil pour peut-être, enfin, sentir la texture et les appels profonds de ces planètes informes aux signaux somatiques.
Encore une fois, renouer les rituels, se réinventer des repères, sentir les porosités variables, les espaces habitables et dans les interstices, conjurer l’éther.
Louons les grands vents:
L’air est rare et plus mince que jamais
mais nous avons préparés nos antres thoraciques
à trouver l’abondance dans les entrelacs du silence.*
* ce texte tresse des homages aux oeuvres et poèmes de Zao Wou-Ki, Claude Roy, Massimo Guerrera, Vinciane Despret et Myro Le Ber Assiani.